Lanarvily III: vers le championnat de Bretagne

Nous poursuivons notre série sur l'Histoire du cyclo-cross de Lanarvily. Un beau succès populaire en 1958 et qui plus est un vainqueur local, il n’en fallait pas plus pour que les jeunes organisateurs néophytes de Lanarvily ne programment une nouvelle fois leur épreuve en 1959. Et on commence très vite à parler du Bretagne: de la kermesse au premier championnat !

Notre photo: vous l'avez reconnu ? la classe, non ?

 

On remet ça !

Un comité d’organisation est créé, il est présidé par M. le Maire assisté d’Iffig Chopin et du secrétaire de mairie. Quelques modifications sont apportées et, à l’inverse de la toute première édition, les premiers ne risquent plus de rattraper les coureurs distancés, au fil des 24 kilomètres. Au départ, 10 coureurs et seulement 7 arrivants… Cette fois encore, Foucher et Laporte, les stars bretonnes de la discipline sont absentes. Visiblement ce peloton des plus maigres ne décourage pas le public puisque l’on dénombre plus de 3000 spectateurs ! Cette fois, les étoiles n’y pourront rien changer : Jean Le Hir, pourtant vainqueur la semaine précédente à La Prénessaye devant Emile Le Bigaut, se fait brûler la politesse et termine second derrière le rennais Jean Guédard mais devant le brestois Gérard Le Roux. A l’issue de la course, fort de son succès, le maire de Lanarvily se plait alors à envisager l’avenir avec confiance et détermination : Il annonce aux personnalités présentes qu’il envisage désormais de poser la candidature de sa commune pour l’organisation du championnat de Bretagne !

La course imaginée par deux amis parcourant la Basse-Bretagne en deudeuche allait désormais devenir un classique du genre. Pourtant, à l’époque, ni Le Hir, ni Chopin n’auraient osé rêver destin plus fabuleux ! Alors que certains organisateurs bretons jettent l’éponge, à une époque où les leaders français de la discipline sont bousculés par de jeunes étrangers, à la pointe de la Bretagne, Lanarvily explosent et, dès les premières années, connaît un succès populaire sans précédent ! 

Jean battu de peu

L’année 1960 permet à Lanarvily de franchir un nouveau palier. Le 21 février, jour de la victoire de l’Allemand Wolfshohl aux championnats du Monde de Tolosa, on peine à circuler à Lanarvily : entre le circuit et la fête foraine, une foule immense a envahi le bourg ! Et cette fois, quelques champions bien connus ont effectué le déplacement vers l’ouest de la Bretagne.  Visiblement agacé par sa médiocre quatrième place aux championnats de Bretagne, Fernand Laporte mène la course tambour-battant et distance ses rivaux dont Martinet, champion d’Anjou et ses trois équipiers. Comme de coutume, le public léonard n’a d’yeux que pour Jean Le Hir qui, victime d’une crevaison, doit laisser filer son groupe de contre attaque. A noter également la bonne performance de Joseph Le Hir, frère de Jean, nouveau venu dans les sous-bois.

Pour quelques rochers…

Il est aujourd’hui encore l’une des principales chevilles ouvrières du cyclo-cross, l’une de ses figures les plus sympathiques ! Pierrot Tanguy se souvient quant à lui de la troisième édition. En 1961, il mène, face aux anciens et aux élus communaux, la rébellion des jeunes bénévoles de Lanarvily ! Ces membres de la JAC, jeunesse agricole catholique, et de la JOC, jeunesse ouvrière chrétienne, ne ménagent pas leurs efforts et ont largement contribué à la réussite des premiers cyclo-cross. L’affaire va secouer la commune ! Ils découvrent que, sur proposition du maire et suite à la décision du conseil municipal, une partie des bénéfices des deux premières courses a été attribuée à la réparation du toit de l’église !

La jeunesse active de Lanarvily réclame alors sa part du gâteau… Pierrot rencontre les édiles et sollicite une petite participation financière, une obole qui devrait permettre aux jeunes de louer un car et d’organiser une journée de promenade au Huelgoat. Le refus est catégorique et les jeunes sont fermement ramenés à leurs chères études : « Vous n’êtes qu’une bande de vauriens ! » Argument ultime, on prétexte qu’après les rochers du Huelgoat, l’année suivante, les jeunes révoltés réclameront des châteaux en Espagne ! Pierrot Tanguy se souvient encore de sa réponse décontenancée : « Mais on n’a jamais eu l’intention d’aller visiter des châteaux en Espagne ! Nous, ce qu’on veut, c’est voir du granit au Huelgoat ! » Réunion de crise dans la nuit du vendredi au samedi et décision est prise de ne pas travailler à la réussite du cyclo-cross : les quinze jeunes qui devaient tenir les « postes de perception du droit d’entrée » ne seront pas à leur poste ! Dans la matinée, l’un des rebelles, hélas, vend la mèche et le comité prévoit des remplaçants : in extremis, les conseillers municipaux sont appelés à la rescousse et sauvent le comité d’une faillite certaine. Mais « la bataille du Huelgoat » a visiblement ouvert les esprits : Dès 1962, le travail des bénévoles fut considéré à sa juste valeur et tous obtinrent, par exemple, un casse-croûte à la fin de la course !

Vers le Bretagne 

Côté sportif, en cette année 1961, on annonce un duel captivant entre Régnier, champion de Bretagne en titre, et Robert Le Denmat. Le dimanche précédant, le Briochin a donné du fil à retordre au célèbre Jean Robic, sur le circuit brestois de l’Hermitage. Après un départ extrêmement rapide, le rennais Jean Régnier distance ses adversaires : il faudra six tours avant que Le Denmat ne réalise la jonction et prenne la tête pendant deux tours. A quelques boucles de l’arrivée, le porteur du maillot blanc à hermines reprend la direction des opérations. Régnier, domine les débats et l’emporte devant le briochin Le Denmat, Gouyette (Cléder) et… Jean Le Hir ! Devant plus de 5.000 spectateurs ravis, les lauréats confirmèrent que le circuit du Mingant pouvait recevoir un championnat de Bretagne… Vous l’avez compris, l’idée faisait déjà son chemin !

GM