Une équipe à elle toute seule a symbolisé fin juin le changement de braquet de la SportBreizh U19 désormais étiquetée UCI, la team Inca qui a aligné Cristian Moncada Giraldo, Jaide Murcia Arbelaez, deux coureurs venus de Colombie, Karl Askel Tilly, un Danois qui a intégré l’équipe l’avant-veille du départ à Châteauneuf-du-Faou. A ces trois coureurs étrangers sont venus s’intégrer deux Bretons issus de l’AC Lanester 56 junior, Lenny Cren et Maxime Bourhis et un coureur du cru, le Cantalien Antoine Verhaeghe (photo, no 43), car cette équipe très internationale est basée à Aurillac, préfecture du Cantal.
Et ne croyez surtout pas que cette équipe s’est constituée de bric et de broc pour prendre le départ de la course. A l’arrivée de la première étape à Chateauneuf-du-Faou, Karl-Askel Tilly le Danois terminait 13e. « Par chez moi, c’est tout plat. Je voulais venir en France pour faire des courses où il y a du dénivelé. Je suis donc arrivé dans le Finistère l’avant veille de la Sportbreizh », explique-t-il en anglais. Dans cette même étape, Cristian Moncada Giraldo terminait 16e. Le lendemain à Argol la quasi totalité de l’équipe finissait dans le peloton à 12 secondes du vainqueur Similien Hamon, à l’exception de Maxime Bourhis, pris dans la chute collective. Victime d’un traumatisme crânien, le coureur de Lanester fut contraint à l’abandon (absent sur la photo).
A l’origine, un projet culturel
Le team Inca repose sur les épaules de Jean-Jacques Goullieux (gauche sur la photo en compagnie de David Bertrand autre membre du staff Inca). Il y a moins de dix ans, rien ne prédisposait ce Cantalien à se lancer dans l’aventure de la création d’une équipe cycliste. « J’ai couru dans le passé, mais ce n’est pas la peine de vous plonger dans les classements de l’époque, vous ne trouverez pas mon nom. Depuis, je suivais le vélo à la télé et dans les journaux et c’était à peu près tout ». Son épouse est péruvienne et Jean-Jacques lui donne un coup de main dans l’animation de son association culturelle franco-péruvienne. Le lien avec le vélo se fait par un ami péruvien qui lui suggère de faire venir quelques-uns de ses compatriotes coureurs en France. « A ses débuts, le projet était autant culturel que sportif », poursuit Jean-Jacques.
Une équipe junior
En 2017, quatre premiers coureurs quittent l’Altiplano pour les reliefs du Massif Central. L’année suivante, ils sont deux. Mais les résultats ne suivent pas. « Nous accueillions à l’époque des coureurs de plus de 18 ans. Les niveaux étaient trop disparates. Certains avaient déjà des agents. Bref, ce n’était pas la bonne formule », précise Jean-Jacques qui pour mener à bien ce projet a monté un club hors DN, le Team Inca. Si les débuts furent difficiles, cette filière pour courir en France, commence néanmoins à être connue outre-Atlantique.
« L’année blanche due à la crise du Covid fut l’occasion de réfléchir et revoir intégralement le projet. Nous avons décidé de repartir sur la base d’une équipe junior », poursuit Jean-Jacques. L’effectif devient dès lors essentiellement colombien. « Nous travaillons avec des partenaires sérieux. Je me rends régulièrement là-bas pour les rencontrer et discuter avec les coureurs qui veulent découvrir le cyclisme français. Je reste sur place une dizaine de jours pendant lesquels nous leur faisons passer des tests, nous regardons l’environnement dans lequel ils évoluent », rajoute le manager du Team Inca, devenu ainsi une académie cycliste franco-colombienne.
Six mois en France
Les jeunes sud-Américains, encore mineurs, arrivent en France pour une période de six mois pendant laquelle ils bénéficient d’un programme de courses relevé et de tout l’accompagnement nécessaire à leur épanouissement de jeunes sportifs (programmes d’entrainement, diététique, suivi médical, initiation linguistique, etc). Des conditions bien supérieures à celles qu’ils peuvent espérer là-bas où, après quelques bons résultats, ils peuvent tomber rapidement sous la coupe d’agents pas toujours scrupuleux.
Six jeunes Colombiens forment l’effectif 2024. Pour faire face à un programme de courses ambitieux avec des moyens très limités, le team ouvre ses portes à quelques autres coureurs étrangers, tels cette année le Britannique Théo Anderson, le danois Karl-Askel Tilly. Ainsi ce dimanche 7 juillet, le team Inca constituait l’ossature de la sélection départementale du Cantal, engagée sur le Tour du Carmausin Segala, quatrième manche de la coupe de France U 19. Karl-Askel Tilly termine huitième.
Sur d’autres épreuves, en raison de son effectif réduit, le team n’hésite pas à créer des ententes, comme cela fut fait sur la Sportbreizh avec l’AC Lanester. « Ce fut une très bonne expérience. Nous réussissions à communiquer en anglais », explique Lenny Cren.
Intégrer des continentales développement
Depuis 2023, le team est entrainé par Paul Sauvage, 28 ans, ancien coureur du CC Etupes, du CR4C Roanne et les résultats suivent. Au mois de mai, Théo Anderson s’adjugeait le général du Tour du Pays d’Olliergues et Kevin Andres Estupinan Vargas (junior 1) terminait troisième. Juan Diaz Garcia a gagné la Classique Jean-Patrick Dubuisson au mois de mai. A cela il faut ajouter plusieurs top cinq.
Par le passé, des coureurs Inca ont brillé comme Jhon Jairo Alonso Ciprian, 3e de la Classique des Alpes en 2019. Il fut ensuite engagé par l’équipe espagnole Caja Rural - Seguros. En 2023, un autre Inca, Diomedez Velandia Florez rejoignait la Conti italienne Galina Ecotek Lucchini. Des expériences professionnelles sans vrais lendemains. L’objectif idéal selon Jean-Jacques Goullieux serait de trouver à ses coureurs un débouché dans les continentales développement des équipes World Tour pour qu’ils aient vraiment le temps de poursuivre leur cursus académique en bénéficiant d’un encadrement bien structuré. Histoire que l’aventure européenne de ces coureurs en devenir ne se limite pas seulement à six mois.
Albert Le Roux
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